L'Homme se différencie de l'animal par son incroyable capacité à multiplier ses jugements sur les choses. C'est ce qui fait de l'animal un être irréprochable et de l'Homme un être parfaitement ridicule. Admirez la neutralité diabolique qui transparaît de l’œil d'un chien à qui l'on tend "Guerre et Paix" de Tosltoï. Face à un tel regard, il n'y a rien à faire sinon poser le livre et caresser le chien.
Admirez ensuite l’œil d'un être humain à qui l'on tend le même type d'ouvrage. Vous aurez autant de réactions que d'egos différents. Et la surprenante onomatopée émise par le picard moyen ("c'est kwo ?") vaudra bien la contenance gênée du jeune parisien en proie à sa propre ignorance.
Rares seront ceux qui vous diront que l'ouvrage relate l'Histoire de la Russie à l'époque de Napoléon. Encore plus rares seront ceux précisant que le récit défend une approche déterministe de l'Histoire. Et presque aucun d'entre eux, si ce n'est quelques poussiéreux professeurs de littérature, ne rappeleront que l'auteur lui-même ne s'attendait pas un tel succès public.
Mais le comble du ridicule est peut-être de constater que l'honnêteté intellectuelle est davantage présente chez l'illettré que chez le professeur de littérature. Admirez l’œil pétillant de celui-ci qui, après de longues années de bons et loyaux services éducatifs, rappelle fièrement que ce chef-d’œuvre de la littérature est à lire plusieurs fois.
Face à un tel regard, il n'y a rien à faire sinon poser le livre et caresser l'individu dans le sens du poil. Le comportement inverse ferait rapidement dévier le débat d'idées vers un débat d'egos plutôt dangereux.
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on dimanche 23 novembre 2008
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